Statue (perdue) dans l'église des Cordeliers de Nancy (v 1508-1509)

René II fonda, en 1487, un couvent de Cordeliers au nord de son palais nancéien. Cette création s'inscrivait à la fois dans la proximité du prince avec l'ordre franciscain et la volonté de manifester la puissance du duc vainqueur du Téméraire et qui souhaitait en faire son lieu de sépulture. De fait, à sa mort en 1508, un monument partiellement conservé aujourd'hui lui fut aménagé dans la nef de l'église. Ce tombeau se composait d'un sarcophage portant une effigie gravée en bronze et un enfeu richement orné.

Décoré de grotesques (candélabres, putti, etc...), ce monument pariétal comporte une vaste niche aujourd'hui vide. Elle abritait originellement un groupe statuaire représentant le duc en prière devant une Vierge à l'Enfant. On a souvent supposé que cette oeuvre était due à Mansuy Gauvain mais rien ne l'atteste positivement. Les deux statues, qui comme nous le verrons eurent une influence certaine sur l'iconographie du duc, furent détruites à la Révolution. Plus tard, au XIXe siècle, on leur substitua des copies réalisées par François-Joseph Labroise. 

L'aspect originel du monument nous est connu par un dessin de Claude Charles gravé par Antoine Sébastien. Elle est datée de 1728. Popularisée par Dom Calmet, cette représentation a été plusieurs fois copiée. On retiendra la lithographie de Jean Cayon et Louis Digout et le dessin de Prosper Morey (in L'archéologie des édifices religieux anciens de la Lorraine, Pl. 68ter). Mentionnons également une gravure conservée à la Bibliothèque municipale de Nancy qui ne reprend que la statue ducale (P-FG-ES-00263).

        

Portrait de René II

Le duc est représenté en position d'orant, tourné vers la gauche. Il est vêtu, aux dires de l'abbé Lionnois, d'une soubreveste verte et de l'ample manteau ducal jaune au camail d'hermine. L'indication des couleurs montre que la statue était peinte. Sur la gravure, le duc semble représenté âgé. Ses traits, et notamment la forme de son nez, correspondent à ce que nous savons de sa physionomie. Devant le prince se trouve un prie-Dieu drapé d'un tissu armorié et sur lequel sont posés la couronne ducale et un livre.

Postérité

Outre la gravure de 1728 et ses avatars du XIXe siècle, la statue de l'enfeu de René II servit de modèles à plusieurs artistes pour représenter ce prince.

- un dessin signé Bellange et conservé au British Museum (XVIIe s ; Inv. 1859,0514.299). L'artiste semble avoir utilisé la statue pour réaliser un portrait du duc. René II, représenté de trois-quart avant, apparaît âgé, les cheveux gris. Le camail est bien visible de même que le col du vêtement en dessous. La couleur n'est pas indiquée mais des motifs végétaux suggèrent des broderies.

- Le portrait sur la médaille de Ferdinand de Saint-Urbain est sans doute tiré de la statue de l'enfeu. Dom Calmet mentionne en effet le monument et la similitude avec la gravure laisse peu de doute. On notera que l'attache du camail est différente de celle représentée par Bellange.

- la reconstitution de la statue par François-Joseph Labroise (1818). Remplaçant la statue originelle détruite sous la Révolution, elle s'appuyait sur la gravure de 1728 et, peut-être, sur des souvenirs de l'artiste. Parmi les modifications apportées, il faut noter l'ajout, sur le prie-Dieu, d'un sceptre, d'une épée et d'un second livre. Cette statue fut très décriée et on la retira en 1935. Elle est aujourd'hui perdue. 

- le vitrail de la basilique Saint-Epvre à Nancy par Carl Geyling (1871). Cette verrière reprend la disposition générale du groupe statuaire de l'enfeu. Il y a cependant de très nombreuses modifications. La plus visible est bien sûr l'étendard que le duc présente à la Vierge.

- CALMET, Augustin (Dom), 1736, Dissertation historique et chronologique sur la suite des médailles des ducs et duchesses de la Maison royale de Lorraine, Nancy.

- CHONE, Paulette, 2010, "Le tombeau de René II aux Cordeliers", Lotharingia XVI, p. 81-106.

- LIONNOIS, Jean-Jacques Bouvier (abbé), 1811, Histoire des villes vieille et neuve de Nancy, depuis leur fondation, jusqu'en 1788, 200 ans après la fondation de la Ville-Neuve, Nancy, p. 113.

- MEYER, Guillaume, 2010, "René II et les regalia de la principauté lorraine", Lotharingia XVI, p. 81-106.

- MOREY, Prosper, nd, L'archéologie des édifices religieux anciens de la Lorraine, Nancy. (livre manuscrit conservé à la Bibliothèque municipale de Nancy)